L'Été est une blonde, auprès de qui il fait bon
dormir. Sous un tilleul, à l'heure de la sieste. Quand les champs de
blé sont figés sous la chaleur. Quand rien ne bouge. Sauf
peut-être quelque main paresseuse, qui suit avec de lentes voluptés la
courbe de collines et de creux ombrés...
L'Été
aime se promener toute nue, au bord des mers. Le soleil la brûle, la
dore, la caresse toute. Dieu que c'est bon! Elle est au sommet de sa
beauté. La trentaine triomphante, un peu Rubens, un peu Renoir. Elle
récolte sans façons ce que d'autres ont semé: le bonheur, les joies de
la plénitude, la gloire de l'abondance.
Tout lui est
dû. Elle engrange, non par avarice, mais par prévoyance. Elle a passé
l'âge des illusions, et sait qu'un orage peut troubler à tout instant
le ciel le plus clair.
L'Été est mère et amante.
Bientôt sa taille s'arrondit, ses seins deviennent lourds. Elle se
prélasse, gonflée de promesses, cherche moins à séduire. Les moissons
sont faites, ses cheveux d'or coupés. Les fruits de ses amours font
plier les branches.
Le soir, l'Été rêve avec les
bergers, regarde pleuvoir les étoiles filantes. Elle s'abandonne à la
douceur des nuits parfumées de chèvrefeuille. Le rossignol chante pour
elle. Il lui explique avec précaution, des heures durant, que le temps
est venu de songer au grand voyage. Que d'autres ciels l'attendent. Que
d'autres hommes espèrent sa venue, ailleurs. Qu'ils ont envie d'elle,
si fort... Qu'elle doit les combler à leur
tour.
L'oiseau chante, plaide, insiste. Mais
l'Été n'écoute pas. La barbe, rossignol! Je veux
encore jouer à l'Indien...
Allez à l'automne